Comment gérer la hausse du taux d’inclusion des gains en capital

Vivek Bansal
CPA, CA, TEP
Directeur, Planification fiscale et successorale, Placements Mackenzie

Le Budget fédéral de 2024 a annoncé que le taux d’inclusion des gains en capital devrait passer de la moitié (50 %) aux deux tiers (66,67 %) pour les gains en capital réalisés à compter du 25 juin 2024 (la « date d’entrée en vigueur »). Le présent article résume l’incidence potentielle de cette hausse sur vos clients.

Les sociétés

Chaque tranche de 1 $ de gains en capital réalisés par des sociétés canadiennes après la date d’entrée en vigueur serait assujettie au taux d’inclusion plus élevé. Si vos clients cherchent à vendre des placements dans leur société privée, la hausse du taux d’inclusion signifierait que leur impôt sur le revenu des sociétés passerait de 25,08 % à 33,45 % (en supposant les taux de l’Ontario), faisant ainsi augmenter le fardeau fiscal de leur société. Vos clients devraient-ils donc réaliser des gains en capital avant le 25 juin 2024?

Une façon de réfléchir à cette décision est de tenir compte du revenu après impôt que votre client peut recevoir selon les deux options, en considérant à la fois l’impôt des sociétés et l’impôt des particuliers. Selon les taux d’imposition de 2024 en Ontario (voir l’illustration 1), vos clients paieraient probablement 38,62 % en impôt total (impôt sur les revenus combinés des particuliers et des sociétés) pour retirer des fonds de leur société privée s’ils cristallisaient les gains en capital après le 24 juin 2024. Il s’agit d’une augmentation de 9,65 % par rapport au taux d’imposition combiné actuel des sociétés et des particuliers de 28,97 %. Par conséquent, si vos clients cherchent à rééquilibrer leur portefeuille d’entreprise ou à vendre des placements d’entreprise afin d’obtenir des liquidités pour leurs dépenses personnelles en 2024, il pourrait être plus avantageux pour eux, sur le plan fiscal, de réaliser des gains en capital avant la date d’entrée en vigueur. En revanche, si vos clients ont l’intention de détenir leurs placements d’entreprise à long terme, le report de la cristallisation des gains en capital pourrait procurer des rendements après impôt plus élevés.

Les changements apportés au taux d’inclusion des gains en capital auront également une incidence sur l’intégration. Selon le principe de l’intégration, l’impôt total prélevé sur le revenu gagné par un particulier devrait être égal à l’impôt total prélevé sur un revenu gagné par l’entremise d’une société.  Si nous comparons le taux d’imposition combiné des sociétés et des particuliers aux taux d’imposition des particuliers les plus élevés sur les gains en capital, les propositions augmenteront le coût fiscal de la réalisation de gains en capital par l’intermédiaire d’une société privée (voir l’illustration 2). Le taux d’inclusion des gains en capital plus élevé, passant de la moitié aux deux tiers, signifie par ailleurs que le solde du compte de dividendes en capital (CDC) de la société n’augmentera que par un tiers des gains en capital, comparativement à la moitié selon les règles actuelles. Cela réduirait le montant des dividendes en capital libres d’impôt que la société peut distribuer à l’avenir et ainsi se traduire par une hausse de l’impôt personnel pour le particulier actionnaire. Autrement dit, il pourrait être plus avantageux sur le plan fiscal de réaliser des gains en capital directement en tant que particulier, surtout pour la première tranche de 250 000 $ de gains en capital réalisés annuellement, comme nous le verrons ci-dessous.

Les particuliers

Aux termes des changements proposés, les particuliers auront toujours accès au taux d’inclusion des gains en capital de 50 % sur la première tranche de 250 000 $ de gains en capital réalisés au cours de chaque année civile, mais tout excédent sera assujetti au taux d’inclusion de 66,67 %, ce qui représente essentiellement une hausse de 33 % des taux d’imposition effectifs au Canada. Malgré cette hausse des taux d’imposition, il n’est peut-être pas toujours avantageux, fiscalement parlant, pour votre client de cristalliser tous les gains en capital accumulés avant la modification des règles.

Une façon de déterminer l’option optimale est d’examiner les économies d’impôt découlant du fait de réaliser des gains en capital plus tôt comparativement à la perte de rendements à imposition différée sur les liquidités utilisées pour payer l’impôt par anticipation. La comparaison peut être utilisée pour calculer une « période d’atteinte de la rentabilité », c’est-à-dire le minimum d’années de croissance avec report d’impôt nécessaire pour produire un rendement après impôt supérieur aux économies d’impôt.

À titre d’exemple, supposons que votre client cherche à déterminer s’il devrait tirer parti de l’inclusion plus faible des gains en capital avant le 25 juin et réaliser la totalité de gains en capital de 350 000 $ dans son portefeuille non enregistré. Il est important de se rappeler que la première tranche de 250 000 $ de gains en capital réalisés avant ou après le 25 juin 2024 profiterait du même taux d’inclusion des gains en capital de 50 %. La différence réside dans l’imposition des 100 000 $ restants. Si ce montant est imposé avant le 25 juin, l’impôt à payer s’élèvera à 26 765 $ (en supposant que votre client est assujetti au taux marginal d’imposition le plus élevé en Ontario). Cet impôt à payer augmenterait à 35 687 $ si les gains étaient réalisés après le 24 juin 2024. Il est donc possible d’économiser 8 922 $ d’impôt en réalisant les gains en capital avant les changements apportés aux règles.

Alors, quelle est la « période d’atteinte de la rentabilité » dans cet exemple? Si l’impôt n’était pas « déclenché », il faudrait environ sept ans de croissance en report d’impôt des gains en capital (taux de rendement annuel composé de 6 %) pour égaler les économies d’impôt. Autrement dit, si les placements étaient conservés pendant au moins sept ans et que la croissance composée était de 6 %, votre client aurait probablement plus d’argent après impôt. Par conséquent, si vos clients ne planifient pas ou n’ont pas besoin de liquider leurs placements pendant ces sept ans, ils auraient peut-être intérêt à reporter l’impôt malgré le taux d’inclusion des gains en capital dorénavant plus élevé!

Comme il existe de nombreux facteurs à prendre en compte afin de déterminer la solution optimale pour vos clients, il serait important que ceux-ci effectuent des calculs détaillés avec leur conseiller fiscal en fonction de leur situation particulière.

Illustration 1 : Taux d’imposition combiné des sociétés et des particuliers sur les gains en capital réalisés par une société fermée en Ontario

 

Option 1 – Réalisation des gains en capital avant le 25 juin 2024

Option 2 – Réalisation des gains en capital après le 24 juin 2024

Gains en capital

100 000 $

100 000 $

Gains en capital imposables

50 000 $

66 667 $

Impôt des sociétés

25 085 $

33 447 $

Impôt remboursable

15 335 $

20 447 $

Impôt des sociétés net

9 750 $

13 000 $

Solde du compte de dividendes en capital

50 000 $

33 333 $

Liquidités disponibles dans l’entreprise

90 250 $

87 000 $

Dividende en capital non imposable

50 000 $

33 333 $

Dividende non déterminé

40 250 $

53 667 $

Impôt des particuliers

19 215 $

25 620 $

Revenu après impôt

71 035 $

61 380 $

Taux d’imposition combiné effectif

28,97 %

38,62 %

 

Illustration 2 : Taux d’imposition combinés des sociétés et des particuliers par rapport aux taux d’imposition des particuliers les plus élevés pour les gains en capital dans certaines provinces canadiennes

 

Taux d’imposition des sociétés

Taux d’imposition des particuliers

Province

Avant le 25 juin 2024

Après le 24 juin 2024

Augmentation

Jusqu’à 250 000 $

Coût fiscal

Plus de 250 000 $

Coût fiscal

Ontario

28,97 %

38,62 %

9,65 %

26,76 %

11,86 %

35,69 %

2,93 %

Colombie-Britannique

29,56 %

39,41 %

9,85 %

26,75 %

12,66 %

35,67 %

3,74 %

Alberta

25,77 %

34,36 %

8,59 %

24,00 %

10,36 %

32,00 %

2,36 %

Québec

29,35 %

39,14 %

9,79 %

26,65 %

12,49 %

35,53 %

3,61 %

Nouveau-Brunswick

29,27 %

39,02 %

9,75 %

26,25 %

12,77 %

35,00 %

4,02 %

Manitoba

28,67 %

38,23 %

9,56 %

25,20 %

13,03 %

33,60 %

4,63 %

Nouvelle-Écosse

29,83 %

39,77 %

9,94 %

27,00 %

12,77 %

36,00 %

3,77 %

 

Ces renseignements ne devraient pas être interprétés comme un conseil juridique, fiscal ou comptable. Ce matériel a été préparé à titre informatif seulement. Les renseignements fiscaux contenus dans le présent document sont de nature générale et chaque client devrait consulter son propre fiscaliste-conseil ou comptable. Nous nous sommes efforcés d’assurer l’exactitude des renseignements fournis au moment de la rédaction. Néanmoins, si les renseignements figurant dans ce document devaient s’avérer inexacts ou incomplets, ou si la loi ou son interprétation devaient changer après la date de ce document, les conseils fournis pourraient être inadéquats ou inappropriés. Il ne faut pas s’attendre à ce que ces renseignements soient mis à jour, complétés ou révisés par suite de nouveaux renseignements, de circonstances changeantes, d’événements futurs ou pour d’autres raisons. Nous n’assumons aucune responsabilité en ce qui a trait aux erreurs qui pourraient être contenues dans ce document ni envers quiconque se fie aux renseignements contenus dans ce document. Veuillez consulter votre conseiller(ère) juridique ou fiscal(e) attitré(e).

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Vivek Bansal
CPA, CA, TEP
Directeur, Planification fiscale et successorale, Placements Mackenzie

Vivek Bansal est directeur, Planification fiscale et successorale, chez Placements Mackenzie. Il s’est joint à la société en 2019, comptant 10 années d’expérience professionnelle dans le domaine de la planification fiscale personnelle et d’entreprise. Avant de se joindre à Mackenzie, M. Bansal travaillait chez un courtier de premier plan où il élaborait des stratégies de planification fiscale et successorale pour les conseillers et conseillères. Il est titulaire des désignations de comptable professionnel agréé (CPA), de comptable agréé (CA) et de la désignation de spécialiste en fiducies et en successions (TEP) auprès de la Society of Tax and Estate Practitioners (STEP Canada).

M. Bansal agit aussi fréquemment à titre d’éditorialiste auprès d’Advisor.ca. Consultez le répertoire de ses éditoriaux ici : Vivek Bansal | Advisor.ca